L’intégrale de la musique

On pourrait imaginer qu’en 2022, il n’en va plus exactement comme par le passé, quand les jeunes groupes ou artistes envoyaient partout leurs maquettes en espérant une réaction du type « ce que vous faites nous intéresse au plus haut point. » À la tête d’Aksak Maboul, Marc Hollander est aussi le fondateur de Crammed Discs. Où, raconte-t-il, il reçoit chaque jour une ou deux sollicitations de cet ordre. Les choses n’ont donc pas changé, mais un peu quand même. Voici ses conseils pour attirer l’attention d’une maison de disques.

Bien penser sa maquette

Si en envoyer une reste bien sûr essentiel, tout dépend ensuite de la politique maison. Chez Crammed, on attend de l’artiste qu’il trouve une sorte de juste milieu. « En ce qui me concerne, explique Marc Hollander, il est bon qu’une maquette soit assez avancée mais pas trop non plus. Quand un label qui a envie ou le goût d’intervenir reçoit une maquette présentée comme un produit fini, c’est à prendre ou à laisser tel quel. Mais si elle est trop sommaire, il peut aussi être difficile de se faire une idée de ce à quoi ça peut ressembler. » Pas la peine donc de fignoler au maximum en présentant vos compos comme déjà masterisées et prêtes à être commercialisées. « Surtout si ce qui est recherché, c’est un label qui va vraiment s’investir, accompagner l’artiste pendant un moment, et non juste un distributeur qui va sortir le disque. »

Soigner sa fanbase

Pour autant que l’artiste ou le groupe fasse déjà de la scène, développer un « following » est évidemment un atout. « Même en jouant localement, essayer de constituer une base de fans est une bonne chose. Le following montre que le groupe existe, arrive à se débrouiller par lui-même ou a commencé à le faire. Je pense qu’il y a de moins en moins de labels où on est content d’aider à partir de rien. » Question : jusqu’à quel point les maisons de disques sollicitées accordent-elles de l’importance au nombre de followers rassemblés sur les réseaux sociaux ? Pour Marc Hollander, il compte mais ne constitue pas une valeur absolue. « C’est un rien déprimant de se dire que ça fonctionne un peu comme une cotation en bourse. Cela dit, si le nombre est relativement important, il constitue une indication. Par contre, si l’artiste a... 23 followers, mieux vaut ne pas le dire ! » Ne rien préciser de ce côté-là n’est d’ailleurs pas forcément une erreur : « De super artistes nous contactent même s’ils n’ont pas réussi à se faire connaître par ces biais-là. Mais toute forme de suivi, si elle existe, est à communiquer, y compris, s’il y en a, de la presse : papier, radio, online... »

Connaître les labels sollicités

Pas la peine bien entendu d’envoyer vos compos si elles ne collent pas du tout à l’éthique, à l’esthétique ou au catalogue de la maison. « Nous recevons parfois des choses tout à fait inappropriées, raconte Marc Hollander. Une personne que je ne connais pas me contacte par Messenger à propos d’un chanteur qui a collaboré avec Daniel Guichard... C’est vraiment quelqu’un qui ne sait pas ce que fait Crammed. » Facteur assez souvent déterminant : passer par un contact personnel ou faire l’objet d’une recommandation. « Quelqu’un en qui j’ai confiance qui me parle d’un groupe ou d’un artiste qu’il a vu et qu’il trouve intéressant, ça va éveiller mon intérêt plus qu’un mail qui débarque de nulle part. Tout ça revient à dire qu’il faut essayer de générer une forme de visibilité, de buzz, avant de se lancer. »

Travailler sa présentation

De la même manière qu’il y a un juste milieu à trouver pour la maquette, il y a un équilibre à atteindre dans le descriptif qui l’accompagne. Pas besoin de présentation kilométrique, mais dites-en assez quand même. « Si vous envoyez un mail avec des liens, inutile de lister toutes vos influences. Il faut arriver à résumer d’une manière qu’on imagine attractive. » Le « trop » est dissuasif ! « Mais j’en reçois tous les jours, des choses comme ça. Certes, ce n’est pas parce qu’on décrit mal sa musique qu’elle n’est pas bien, mais ça laisse tout de suite une impression. Et à l’inverse, être trop mystérieux, ou provocateur, moi ça ne me donne pas envie non plus. »